L’orthopédie au début du XIXème siècle

L’Orthopédie

Même si le mot « orthopédie » apparaît à la fin du XVIIIe siècle, un des premiers passages écrits sur le sujet reste la méthode de réduction de la luxation de l’épaule décrite dans le « Traité des os et articulations » d’Hippocrate (460-370 av J.C.). Guy de Chauliac (1290 ? -1368) expose dans « Chirurgia magna », un traitement des fractures du fémur, par extension continue, avec hamac, poids et poulie. Puis Ambroise Paré (1510-1590) est le premier à utiliser un corset dans le traitement des scolioses et codifie les positions d’immobilisation, notamment celle de la hanche en extension. Jean-Louis Petit publie, en 1705, « L’Art de guérir les maladies des os » où il crée une nouvelle machine pour réduire fractures et luxations.

Il faut attendre Nicolas Andry de Boisregard (1658-1742) qui publie en 1741 « L’Orthopédie, ou l’art de prévenir et corriger dans les enfants, les difformités du corps » pour que le terme « orthopédie » soit composé.

« Quant au titre en question, je l’ai formé de deux mots grecs, à savoir d’Orthos, qui veut dire droit, exempt de difformité qui est selon la rectitude et de Paidion qui signifie enfant. J’ai composé de ces deux mots, celui d’orthopédie, pour exprimer en un seul terme, le dessein que je me propose, qui est d’enseigner divers moyens de prévenir et corriger dans les enfants, les difformités du corps

Nicolas Andry ne révolutionne pas la médecine, d’ailleurs une controverse entre J.-L. Petit et lui s’engage. Il fonde cependant une nouvelle approche, qui va au-delà de la médecine de l’époque, en voulant corriger par la prévention les déviations corporelles naissantes. Sa gravure de « l’arbre tors », illustrant le traitement de la scoliose, devint le symbole de l’orthopédie contemporaine. Cette symbolique est reprise par F. Humbert dans la vignette qui lui sert de marque.  

En 1772, Thomas Levacher de la Feutrie (1738-1790) publie son « Traité du rakitis, ou l’art de redresser les enfants contrefaits » où il décrit son appareil de maintien de la colonne vertébrale. Enfin, Charles Venel (1740-1791), chirurgien installé en Suisse, fonde en 1780, après avoir traité un enfant souffrant d’un pied-bot, l’établissement orthopédique d’Orbe (canton de Vaud). Les techniques employées à Orbe, reposant sur des massages, manipulations et autres applications d’appareils sont des méthodes sans intervention chirurgicale. A côté de ces figures, il existe nombre de manipulateurs et autres rebouteux.

C’est dans ce contexte où les savoirs sont en train de se former et de se codifier, que l’orthopédie à la charnière des années 1800 se développe, souvent de manière empirique, générant suspicion, controverse et espoir.

Il faut attendre la fin des années 1810 pour que les premiers établissements spécialisés apparaissent. Des médecins, des mécaniciens, des gouvernantes de pensionnat ouvrent des maisons, principalement en ville. Vers 1830, on dénombre une vingtaine d’établissements, à Paris, sans compter les maisons d’éducation qui possèdent quelques lits orthopédiques.

Cette « frénésie orthopédique » perdure jusqu’à la fin de la Restauration, provoquant critique et espoir thérapeutique. Le pamphlet anonyme, écrit « par un docteur en médecine » (sic) en 1826, qui espérait que les « fanfaronnades orthopédiques de Levacher » soient oubliées, est un véritable réquisitoire, sans concession aucune. Némésis, la revue médicale illustrée, recueil de satires, publie, en 1840, une gravure illustrant la crédulité des personnes qui se ruent sur ces nouveaux lieux de soins.

Le graveur satirique, Frédéric Bouchot (1798-186?) construit sa réputation vers 1832 sur une série de dessins nommés « caricatures orthopédiques » qui jouent sur les étirements.

En mars 1826, à Paris, le vaudeville « Le tailleur des bossus ou l’Orthopédie » est joué au théâtre. D’autres pièces satiriques prennent ce thème.

Sources et crédits photographiques

Association F. Humbert de Morley

L’arbre redressé, gravure extraite de Nicolas Andry de Boisregard, L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger dans les enfans les diformités du corps. Le tout par des moyens à la portée des Peres & des Meres, & de toutes les Personnes qui ont des Enfans à élever, Paris, La Vve Alix, Lambert & Durand, 1741, I, p. 282.


Chaise d’extension de A.-F.-T. Levacher de la Feutrie (1739-1824), pour le traitement de la scoliose.


Scoliose, François Joseph Malgaigne : Leçons d’orthopédie professées à la faculté de médecine de Paris recueillies et publiées par Guyon et Panas 1862.